Le bambou, champion du développement durable ?

Le bambou, champion du développement durable ?
BambouMaison, tissu, papier, tôle, contre plaqué, parquet,  »éthanol » . La liste des produits fabriqués à partir du bambou pourrait être longue. On compte au minimum 1500 utilisations du bambou, certains vous diront qu’il en existe 5 000. Pourtant elles sont pratiquement invisibles sous nos tropiques. Resté souvent dans les esprits comme un produit voué à l’artisanat, il est perçu comme éphémère, peu solide et parfois même accusé d’attirer les serpents : dommage !

Pourtant, les propriétés du bambou ne cessent d’étonner le monde entier. Pour exemple, le bambou est l’herbe (parce que c’est une herbe) qui pousse le plus rapidement au monde. Dès qu’il atteint l’âge de 4 ans, il est possible de le récolter et il se régénérera tout seul, et ce de manière exponentielle. C’est pour cette raison qu’il est d’ailleurs considéré comme  »la » solution pour la préservation des forêts. Une forêt de bambou séquestrerait plus de carbone qu’une forêt d’arbres. On a prouvé qu’une plantation de bambou pouvait assainir les sols et les cours d’eau. Il existe entre 1 200 et 1 500 espèces de bambous. Ces propriétés lui donnent son identité écologique et le portent aujourd’hui au rang de champion des symboles écologiques et du développement durable.

Par ailleurs, le bambou est plus solide que l’acier, que le bois et selon une étude de l’US Navy peut servir à armer le béton, chose que les Colombiens pratiquent depuis des décennies. Bref, il ne cesse de faire des émules et de défrayer la chronique à travers la planète. Aux États-Unis, on parle de Bambou Boom. Les magasins de vêtements en bambou ne cessent de s’ouvrir car le vêtement en bambou est considéré comme naturellement antibactérien. Les maisons en bambou ont conquis l’État de Hawaii et de la Californie, les designers New-Yorkais ont définitivement élu le bambou comme matière éco-luxueuse la plus en vogue du moment. La Société Américaine du Bambou (American Bamboo Society) ne cesse de voir le nombre de ses membres augmenter.

Charpente en bambou

Quant à la Chine, on estime que son commerce du bambou a dépassé le milliard de dollars . D’un point de vue du développement, plusieurs pays dont Cuba ont décidé d’investir dans le bambou afin d’ajouter une nouvelle corde à leur arc économique. En Inde, l’exploitation du bambou prend des tournures industrielles, voire éco-industrielles avec la fabrication des tôles et du contre plaqué en bambou. Ce qui évidemment est dans l’air du temps et est une mise en pratique du concept de développement durable. Quant au géant brésilien, il entend devenir le numéro un en terme de production de papier en bambou(*).

Force est donc de constater que le monde du bambou bouge. Que le bambou, enfin, est en train de prendre une place de choix dans l’économie mondiale et surtout dans le quotidien de milliards d’individus. Cependant, notons que les logiques de développement du bambou prennent, avec une couleur verte, le chemin d’une industrialisation qui reste classique et dont nous pouvons douter qu’elle continuera à être durable. Dans le même temps, cette herbe souvent considérée comme mauvaise dans certains pays et notamment dans les îles, est en pratique en train de prouver à quel point nous nous sommes trompés et nous nous trompons encore sur son compte .

Pont de bambous

Elle peut effectivement être à la source de projet de développement durable mais encore faudrait-il que nous sachions de quel développement durable nous parlons ? Celui vu à la lueur de la mondialisation, d’une socio-économie locale, d’un équilibre entre les deux ? Ou sommes nous, simplement, à l’aube de nouvelles formes de développement et d’un équilibre entre industrie et artisanat imposée par une matière étant elle-même à l’aube de son exploitation ? Ainsi, ce sera encore une fois à nous, l’humain, de donner un sens positif (ou pas) à notre rapport à la nature, à la matière, au bambou et donc au développement durable que nous souhaitons voir naitre dans notre environnent.

Xavier Dufrénot
Doctorant en Sociologie du Développement
IEDES (Institut d’Étude du Développement Économique et Social)
Paris 1, la Sorbonne
(*) in The Bambou in Brazil, 2007 training course on Technology for Developing Country ; Universitad Technologica Federal do Parana : La plus grande zone d’usage industriel du bambou (Bambusa vulgaris) au Brésil est de 100 000 ha pour 70 000 tonnes de production (usines de cellulose et de papier).

 

AvA-Infos, ouvrons nos regards à la planète

Les News du fenua durable
actualités, revues de presse